
Dans le cadre des transactions immobilières, l’agent immobilier exerce sa mission en qualité de mandataire : il reçoit, par un mandat écrit, le pouvoir d’agir au nom et pour le compte de son mandant. Il est soumis à la réglementation stricte posée par la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 dite loi Hoguet à laquelle il ne peut pas déroger.
L’agent immobilier répond des fautes professionnelles dans l’exercice de sa mission dès lors qu’elles ont causé un préjudice au mandant et qu’un lien de causalité est établi entre la faute contractuelle et le dommage subi.
Dans la grande majorité des décisions, les juges visent le manquement au devoir d’information et de conseil comme fondement de la responsabilité de l’agent immobilier.
D’une manière générale, la loi et la jurisprudence imposent à l’agent immobilier de se renseigner et de vérifier tout ce qui peut faire obstacle à la vente ou influer sur le consentement des parties, d’en informer ces dernières et d’attirer leur attention sur l’état du bien et les risques de l’opération. Dès lors qu’il prête son concours à la rédaction d’un acte, il est tenu de s’assurer que se trouvent réunies toutes les conditions nécessaires à l’efficacité juridique de la convention. L’étendue des vérifications et des conseils à donner est donc très large.
L’obligation d’information et les caractéristiques du bien :
L’agent immobilier doit attirer l’attention de l’acquéreur sur l’existence de tout vice, juridique ou technique, dès lors que ce vice ou les conséquences qui en découlent ne sont pas évidents pour un prospect et dès lors que l’agent immobilier les connaissait ou, au regard des compétences qui doivent être les siennes, aurait dû les déceler.
La responsabilité de l’agent immobilier est souvent recherchée par les vendeurs et/ou acquéreurs. Mais est-il responsable de tout ?
Pour le savoir, revenons aux principes qui régissent les responsabilités de l’agent immobilier avant d’en voir des illustrations.
Les fondements de la responsabilité
Il existe deux types de responsabilités :
- La responsabilité contractuelle (art.12311 du Code civil)
- La responsabilité délictuelle (art. 1240 du Code civil).
Trois conditions doivent être réunies pour qu’une demande d’indemnisation aboutisse : une faute, un préjudice et un lien de causalité entre eux. Si l’une de ces trois conditions fait défaut, la responsabilité ne peut être engagée. La seule existence d’une faute est insuffisante car elle « n’implique pas nécessairement l’existence d’un dommage en relation de cause à effet avec cette faute » (Cass. 2e civ. 11 septembre 2008, n°07-20857).
Les types d’obligations :
L’agent immobilier est débiteur de deux types d’obligations : une obligation de moyens pour l’intermédiation et une obligation de résultat au titre de la rédaction du compromis.
Pour la recherche d’un acquéreur, l’agent immobilier ne garantit pas qu’il va trouver un acquéreur mais il s’engage à faire ses meilleurs efforts pour le trouver. C’est une obligation de moyen.
Cependant, quand il rédige le compromis, l’agent immobilier – comme tout rédacteur d’acte – est débiteur d’une obligation de résultat.
À ce titre, il doit garantir l’efficacité des actes qu’il rédige (Cass. 3e civ, 28 novembre 2007, n°06-17758).
Quand la responsabilité d’un agent immobilier est mise en cause, il lui est le plus souvent reproché un manquement à son obligation de conseil. Cette obligation de conseil recouvre une réalité extrêmement large et peut s’analyser en une obligation de vigilance, d’information et de conseil.
L’obligation de vigilance :
L’obligation de vigilance résulte de disposition légale ou de la jurisprudence. (voir exemple ci-dessous).
- Tracfin : le professionnel de l’immobilier a une obligation légale de vigilance dans le cadre de la réglementation du traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (dite TRACFIN). Il en résulte diverses obligations pour les professionnels qui y sont assujettis dont une obligation de vigilance (art. L5614-1 du Code monétaire et financier).
- Diagnostics : la cour d’Appel d’Aixen-Provence a retenu quant à elle la responsabilité d’un agent immobilier pour ne pas avoir vérifié un diagnostic Carrez. Le diagnostiqueur avait intégré à tort la cave dans le calcul de la Carrez. Or selon la Cour, par une « simple lecture l’agent immobilier « aurait dû vérifier l’exactitude des informations qui lui étaient transmises » et s’apercevoir de l’erreur. (CA, Aix-en-Provence, 3 septembre 2019, RG 17/07459).
L’obligation d’information :
L’obligation d’information est inscrite dans le Code de déontologie et l’agent immobilier doit informer les vendeurs et les acquéreurs de « l’ensemble des informations qui leur sont utiles pour qu’ils prennent leur décision de façon libre et éclairée » (art. 8-3 du Code de déontologie).
Ainsi, la responsabilité d’un agent immobilier a été retenue pour : (voir exemple ci-dessous).
- N’avoir pas informé des acquéreurs avant la signature du compromis de précédents travaux contre la mérule, dont la mention figurait sur le titre de propriété (Cass. 1ere civ. 14 novembre 2019, n°1821971).
- Avoir insuffisamment informé des acquéreurs d’un sinistre résolu relatif à des fissures, en se bornant à indiquer que le dossier avait été clôturé sans solliciter du vendeur plus d’informations et de justificatifs et sans effectuer plus de recherches (Cass. 3e civ, 14 décembre 2017, n°1624170).
L’obligation de conseil :
La responsabilité de l’agent immobilier peut également être retenue à propos de la solvabilité d’un acquéreur. Dans une affaire où les vendeurs étaient informés des faibles revenus de l’acquéreur, de l’absence de séquestre et de la renonciation à la condition suspensive de financement, la responsabilité du professionnel a été retenue car il ne justifiait pas avoir conseillé aux vendeurs de prendre des garanties, ni les avoir mis en garde contre le risque d’insolvabilité de l’acquéreur (Cass.3e Civ. 11 décembre 2019, n°18-24381). On note ici la différence entre l’obligation d’information qui a été réalisée et l’obligation de conseil qui ne l’a pas été.
Enfin, si l’agent immobilier est tenu d’une obligation de conseil sur le visible et le su, il ne l’est pas sur l’invisible et le non su.
Vices cachés : Quelle responsabilité pour l’agent immobilier ?
L’agent immobilier joue un rôle central dans une transaction, étant souvent le premier interlocuteur entre acheteur et vendeur. Mais quelle est véritablement son implication et sa responsabilité en cas de découverte d’un vice caché ?
Définition du vice caché :
Un vice caché est un défaut non-apparent qui rend le bien impropre à son usage ou en diminue fortement l’usage (art. 1641 c.civ), par exemple, la présence d’infiltrations.
La garantie des vices cachés :
Le vendeur est en principe tenu d’une garantie des vices cachés. L’acquéreur doit alors prouver l’existence du défaut au moment de la vente. S’il n’existait pas au moment de la vente, le vendeur n’en serait naturellement pas redevable ! Le délai d’action de l’acquéreur est de 2 ans après la découverte du vice. Il aura le choix entre rendre le bien et se faire restituer le prix ou alors garder le bien mai bénéficier d’un remboursement partiel.
La clause de non garantie des vices cachés :
Souvent présente dans les contrats, cette clause exonère le vendeur de responsabilité en cas de découverte d’un vice caché par l’acheteur. Toutefois, un vendeur professionnel ne peut pas s’en prévaloir s’il a des compétences en construction. Cette clause protège le vendeur non-professionnel qui ignorait le défaut. Cependant, elle peut être annulée si l’acheteur prouve que le vendeur en avait connaissance et l’a délibérément caché. Mais prouver l’intention de dissimuler le défaut peut être difficile.
La responsabilité de l’agent immobilier :
L’acquéreur peut aussi décider d’engager la responsabilité de l’agent pour manquement à son devoir de conseil. Il devra ici également justifier d’un dossier solide dans lequel il prouve que l’agent immobilier avait connaissance du vice et qu’il ne lui en a pas fait part. Il a 5 ans pour agir contre le professionnel à compter du moment de la découverte du vice.
Attention, aujourd’hui, même si l’agent immobilier n’est certes pas considéré comme un professionnel du bâtiment, de nombreuses décisions de justice ont considéré qu’il devait posséder des connaissances solides lui permettant de repérer certains vices non décelables par un particulier.
Prenons l’exemple d’une décision très récente qui a condamné un agent pour n’avoir pas conseillé l’acquéreur sur un éventuel défaut d’étanchéité de la toiture alors qu’il existait dans le bien des traces d’infiltrations (cass.3e civ. 21-12-2023 n° 22-20-045).
Il est fortement recommandé de traiter chaque dossier avec sérieux en inspectant soigneusement l’état du bien. En cas de doute, faire appel à un expert est essentiel. Ce dernier pourra donner son avis et endosser la responsabilité de sa conclusion.
À découvrir dans notre prochain article :
Qu’est-ce que le carnet d’information du logement